Le texte de la harangue
La foule : Anne-Marie, Anne-Marie !
Anne-Marie : Si j'vieu chi vos parleu, c'eu pasque m'frère qui vieu d'dèquenne del diligence de Bruxelles m'a dit qu'on s'battoit djà dau là. Et nos autes, Athois, nos n'povons nieu chi resteus bras ballants à rieu fé ! A l'casern', les Hollandeus nostent plus moufteu et y sont mucheus padjère les portes. Y sétent l'ougnon ! Chau qui nous faut fé, c'est dalleu qué les fusils et les canons à l'arsenaille et tout conduire à Bruxelles.
La foule : à Bruxelles !
Anne-Marie : Attédeu, nos d'vons étout prenne les officieus pou prisonnieus. Les saudarts, y marchront avé nos aut. Les prones sont meurtes, y faut les quié. C'eu fini ces machins là, no volons no liberteu...
La foule : viv' el liberteu !
Anne-Marie : M'n arrière grand mé qui a fréquenté avé un saudart de dé s'jonesse, n'a jamé ét capâp de m'dire si c'étoit in espagnol, in autrichien ou in franceu... et ça né fini gnieu, c'quo chi, ces des hollandeus ! On n'sé gnieu dallé fé c'polka à Rincollet sans avoir ces bonhomm' là dé les gambes. Nos volons vanseu avé des Athois.
Un ouvrier carrier : Et les mafflous adon ?
Anne-Marie : Si nos dallons à l'ducasse del Chonwé, d'Rbais ou d'Bouv'gnies, nos volons passeu les port del vill' sans toudis êt arrêteu ou bieu visiteu ! C'eu fini... nos volons nos liberteu !
La foule : viv' el liberteu !
Anne-Marie : Ramasseu les sâpes et les fusils qu'il a dé les mésons, les mafflous d'iront à l'casern', les auts hommes iront aux port' del Vill', les ciens qui n'ont gnieu d'fusil perdront des batons, des flayaux.Y nos faut r'conduir' eul tyran à l'frontière.
Un homme : leus loques sont sec !
Anne-Marie : On n'ara plus jamé eun occasion pareil. En avant, viv' eul liberteu !
La foule : viv' el liberteu !
"Amour sacré de la Patrie"
L'air chanté après la harangue est tiré d'un duo de l'opéra La Muette de Portici (Auber).
À Bruxelles, au Théâtre de la Monnaie, la représentation de l'opéra du 25 août 1830 (à l'occasion du 59e anniversaire du roi Guillaume Ier des Pays-Bas) a dégénéré en émeutes qui ont conduit à l'indépendance de la Belgique. Au moment de l'air "Amour sacré de la patrie", les spectateurs se levèrent et sortirent dans la rue :
"Mieux vaut mourir que rester misérable
Pour un esclave est-il quelque danger
Tombe le joug qui nous accable,
Et sous nos coups périsse l’étranger !
Amour sacré de la patrie,
Rends-nous l’audace et la fierté ;
À mon pays je dois la vie.
Il me devra sa liberté."
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