Le 31 juillet 1993, le Roi Baudouin décédait à Motril en Espagne plongeant la Belgique dans un deuil sans aucune mesure. Les Belges avaient été par milliers à se déplacer au Palais Royal pour se recueillir devant la dépouille du Roi défunt...
Mais l’Athois Christian Cannuyer, grand spécialiste des têtes couronnées, a vécu un moment hors du commun comme il nous l’a expliqué : « Lors de la mort du Roi Baudouin, j’ai été frappé par l’émotion qui a étreint toute la Belgique. Même à Ath, ville de tradition plutôt « rouge », cette émotion fut très palpable. Et pourtant, durant toute la semaine où des files innombrables se pressaient au Palais pour rendre hommage à la dépouille mortelle du Roi, je me suis abstenu de le faire, sans savoir trop pourquoi… ». Et Christian de poursuivre : « Mais le dernier jour avant les funérailles, éprouvant un énorme regret, je me suis résolu à tenter de me rendre au Palais. Je me disais toutefois qu’il était sans doute trop tard. La dernière file d’attente était encore très longue et les portes du Palais allaient fermer dans quelques heures. »
Non sans une certaine audace, Christian Cannuyer a téléphoné directement au Grand-Maréchal de la Cour, lui expliquant sa peine de n’avoir pu rendre hommage à ce souverain qu’il admirait tant. « J’étais connu au Palais grâce aux articles et livres que j’avais publiés sur la dynastie, et que j’avais eu l’occasion de présenter personnellement au roi Baudouin. Le grand-maréchal me répondit immédiatement : « Pas de souci, M. le Professeur, on vous attend. Présentez-vous à la porte latérale du Palais, rue de Brederode, et un huissier vous conduira au salon du Penseur, où est exposée la dépouille de sa Majesté ».
Avec son épouse Anne, ils ont roulé à toute vitesse vers la capitale, afin d’arriver sur place avant la fermeture des portes du palais. « Nous avons été conduits par un huissier au grand escalier d’honneur, que nous avons monté entre une haie de soldats de l’escorte royale en tenue d’apparat. Le silence était impressionnant. Puis, à mon corps défendant, on nous fit couper la file d’attente et nous eûmes le privilège d’un accès immédiat à la chambre mortuaire. » L’historien de continuer : « J’entendais des gens qui, un peu interloqués, chuchotaient : « Mais qui donc sont ces personnes qui passent ainsi avant tout le monde ? Des parents princiers ? Un ambassadeur et son épouse ? »
Dois-je vous traduire l’intensité des sentiments qui furent les nôtres lorsque nous nous sommes retrouvés ? Instant d’exception dans notre vie que mon épouse et moi-même n’oublierons jamais. Le lendemain, c’est avec une ferveur totale qu’ils ont participé aux funérailles nationales, au milieu de tant et tant de Belges. Et Christian de conclure : « Nous avons été impressionnés par le fait que les dirigeants de toute la planète, même la reine d’Angleterre qui ne se déplace jamais pour un enterrement à l’étranger, s’étaient donné rendez-vous pour l’au revoir à un souverain d’une rare envergure humaine. »
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