Ce samedi, le bourgmestre Bruno Lefèbvre a envoyé aux médias son ressenti. Nous le publions dans son entièreté
"Petite pensée que je souhaitais partager avec vous...
Je connais notre Ville depuis ma plus tendre enfance.
J'ai l'honneur d’en être le Bourgmestre depuis 2018.
Dès 2019, alors que je participais à ma 1ère ducasse en tant que Bourgmestre, je me suis fait interpeller assez virulemment par un groupe de pression bruxellois pour une représentation "raciste"
au sein de notre belle ducasse : le personnage du "sauvage" devenait problématique après 140 ans d'existence au sein de notre folklore.
Cette 1ère approche fut d'une brutalité sans nom, de nombreux citoyens se firent insulter parfois violemment par ces « bien-pensants » sous prétexte qu'ils publiaient sur des réseaux sociaux leurs
bonheurs partagés avec ce fameux personnage. Cette réaction extérieure fit l'effet d'une bombe au sein de notre communauté athoise. Le sauvage devenait soudain une représentation raciste. Quelle affreuse méprise pour ce personnage du cortège adulé par nombre d'Athois et qui n’avaient jusqu’alors jamais vu les choses sous cet aspect.
A partir de ce moment, la problématique mondiale du « blackface » reposait sur les épaules d’une petite ville de 30.000 habitants qui a été soumise à une forte pression médiatique. Les mois qui suivirent furent difficiles et nombre d’évènements et de sensibilisation furent mis en place. Nous souhaitions démontrer notre bonne foi, pour démontrer à quel point ce "sauvage" fut ce son nom mal choisi - n'était à aucun moment un personnage raciste et que telle n’était pas
l’intention recherchée. Certes, il s’agit d’un personnage comme il y en a dans nos différents folklores, mais si l’intention
raciste n’est pas, la question de savoir s’il doit évoluer ou disparaître ne devait-elle pas supposer une réflexion de fonds tant au niveau de la population athoise, mais aussi pour le folklore en général ? Nous n’étions pas restés mains croisées depuis 2019, que du contraire ! Nous avions privilégié plusieurs initiatives au travers de rencontres, échanges, tables rondes, sensibilisations pour finalement aboutir à la mise en place d'une Commission Citoyenne du Folklore
en novembre 2022 qui était l’expression recherchée à l’issue d’un processus réfléchi. Nous souhaitions en effet privilégier la réflexion collective et la pédagogie de manière progressive
pour ne surtout pas polariser notre population. Cette commission devait non seulement se prononcer sur le personnage dans notre folklore et démontrer l'inexistence d'un quelconque racisme, mais également et surtout organiser une réflexion citoyenne pour déterminer si l'un ou l'autre élément méritait une évolution. Lors de la conférence de presse organisée dans l’immédiateté ce vendredi 2 décembre, je n’ai pu cacher à quel point tout cela m’a impacté émotionnellement.
De par sa décision rapide de nous évincer avec la plus grande des sévérités, l’UNESCO n’a pas souhaité laisser une seule chance au processus démocratique mis en place. L’étonnement était d’autant plus grand puisqu’il était prévu qu’un narratif positif à la conférence de vendredi allait nous permettre de pouvoir travailler avec un calendrier et une mission claire pour réfléchir au devenir
d’un événement pluriséculaire. Ce gage de bonne foi aurait sans nul doute mérité plus de considération.
Mon abattement se justifie ensuite parce que la ducasse d’Ath est aujourd’hui la 1ère manifestation exclue de l'UNESCO... quelle claque ! Tout cela est injuste parce que nous avons le sentiment de nous être fait piéger. L'exclusion de
l'UNESCO n'aurait jamais dû intervenir cette année. Un accord diplomatique existait bel et bien et
l'intelligence collective, les échanges citoyens et la mise en place de cette commission citoyenne auraient pu permettre une autre issue.
Les Athois ne sont pas racistes, ne l'ont jamais été et ne le seront probablement jamais. L’image qui émane de cette décision de l'UNESCO véhicule des éléments très réducteurs vis à vis de
notre population. Elle laisse supposer, à l'échelle de l’humanité, qu'il existe une ville peuplée entièrement d’irréductibles racistes. C'est maladroit et complétement manichéen ! Je voudrais très clairement réexprimer à quel point le folklore athois n'est absolument pas raciste et afficher ma volonté que nous puissions le démontrer aujourd'hui et demain. Ce personnage qui a été créé de toutes pièces et qui existe aujourd'hui depuis près de 150 ans n'a jamais eu pour volonté de l’être.
Je crois sincèrement que la décision qui a été prise hier est maladroite et précipitée. L’UNESCO a balayé d'un revers de la main le travail que nous avions décidé de mettre en place lors du dernier
Conseil communal à l'unanimité des groupes politiques. Ce faisant, l’UNESCO empêche l'intelligence collective de se distinguer pour notre bien commun et nos générations futures. Même si la société et ses mentalités évoluent au fil des ans, l’UNESCO ne pouvait simplement fermer le livre en oubliant que quand elle a reconnu notre ducasse, le Sauvage y était déjà …
Pourquoi, alors que la proposition diplomatique comportait également ce volet, l’UNESCO n’a-t-elle pas accepté avant de nous exclure d’envoyer une délégation à ATH pour poursuivre avec sa
population un dialogue positif ? Je voudrais également m'exprimer à l'égard de celles et ceux que notre folklore a bien
involontairement choqué. A toutes celles et ceux qui ont, sans aucun doute avec une perception qu’on doit entendre, le sentiment que nous ne les respectons pas et plus grave encore que nous ne les acceptons pas. C'est une fausse image! Probablement mise en place pour faire valeur d'exemple à
l'égard de véritables éléments racistes d'autres institutions ou pays.
J'invite chacune et chacun à venir à la rencontre de notre folklore, de notre population afin qu’ils se rendent compte à quel point l'image que d'aucuns souhaitent nous affubler est erronée !
Le sauvage est un élément à part entière de notre folklore et la population l'adule avec fierté et enthousiasme.
La peine que nous ressentons est immense. Aujourd’hui, en ces moments humainement compliqués où ATH est focalisée dans tous les médias, je
veux être aux côtés de notre population, de notre folklore et je voudrais exprimer tout mon soutien à nos citoyennes et citoyens. Je voudrais également adresser une pensée émue et soutenante à celles
et ceux qui jadis ont œuvré à une telle reconnaissance de notre folklore et qui ont vu le travail d’une vie balayé sans considération aucune pour notre volonté d’avancer.
Sans ambages, je voudrais dire à quel point le racisme et la xénophobie seront toujours rejetés de notre beau folklore !
Enfin, je vous demande, plus que jamais, de faire preuve de respect et d’ouverture d’esprit à l’égard de toutes les communautés de notre belle ville. Ne faisons pas l’erreur de tomber dans les
amalgames faciles. Ne donnons pas raison à cette décision inattendue qui nous a jugé racistes, à distance, sans nous écouter et par le biais de raccourcis infondés. Ath est une Ville où il fait bon vivre ensemble et mon vœu le plus cher est que cela transpire dans le
monde entier. Montrons leur que si nous sommes une petite ville, nous sommes avant tout une grande cité de coeur et d’esprit."